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Une nouvelle France

Chaque génération est un peuple nouveau. Cet énoncé a l’allure d’une évidence banale. Mais combien de fois dans l’histoire humaine un peuple a-t-il été autant transformé que le nôtre aujourd’hui ? Songez-y ! Cela donne le vertige : le 1er juin 1958, il y a près de 67 ans, le Général de Gaulle prenait le pouvoir en plein chaos institutionnel provoqué par la guerre de décolonisation de l’Algérie. C’est l’acte de naissance des institutions de la cinquième République. Depuis, trois générations se sont écoulées. Un battement de cil à l’échelle de l’histoire profonde des humains et même de notre pays. Et pourtant, la France a tellement changé ! Davantage peut-être en six décennies qu’en deux siècles auparavant. Elle dessine des contours jusqu’ici inconnus pour un peuple. Comment penser que des outils formés pour la France de 1958 soient toujours adaptés pour celle de 2025, de 2026 ou de 2050 ? La réalité sociale, les besoins, les aspirations, les problèmes sont si différents !

Commençons par le plus important, et probablement la rupture dans la condition humaine la plus énorme de l’époque : la condition humaine féminine. En 1958, les femmes ont besoin de l’autorisation de leur mari pour ouvrir un compte bancaire ou travailler, elles n’ont aucun accès légal à la pilule contraceptive ni à l’avortement. Il n’y a pas de divorce par consentement mutuel ni d’autorité parentale conjointe. Une mère ne peut pas transmettre sa nationalité à son enfant. Le viol conjugal n’est reconnu comme un crime qu’en 1990 et la parité pour les mandats électoraux pas avant l’an 2000. En somme, à l’aube de la cinquième République, les femmes étaient des citoyennes de seconde zone.

Depuis, c’est comme si avait eu lieu une révolution de libération nationale sur notre propre sol ! La moitié de la population s’est vu attribuer des droits élémentaires dont elle était privée : son autonomie, sa possibilité de construire sa vie de manière indépendante. En moins de 70 ans, les femmes ont profondément révolutionné leur condition. À lui seul, ce fait marque un changement d’époque, et même une nouvelle ère. Le sexisme n’a pour autant pas disparu. Il a muté. Dans le monde du travail, les femmes sont traitées par le capital comme des salariées subalternes. Les femmes touchent en moyenne 23  % de moins que les hommes. Elles occupent 80  % des emplois à temps partiels et représentent les deux tiers des salariés au salaire minimum. Les femmes s’occupent toujours majoritairement du travail domestique et, même dans la sphère marchande, le travail du soin, de la reproduction de la société est moins reconnu.

Mais ce n’est pas le seul des changements. Le peuple français de 2025 a été largement brassé. Rendons nous compte : en 1958, un Français sur dix avait au moins un grand parent étranger. Désormais, c’est un sur quatre. Tant de Français, tant de Françaises ont des liens personnels intimes avec le vaste monde. C’est un atout. Tant ont amené au pot commun leurs plats, leurs musiques, leurs mots, leurs poésies. Oui, la France est une nation créole. Sa culture est une invention permanente aux multiples racines. Mais le fait ne concerne pas seulement l’immigration de l’extérieur de nos frontières nationales. En 1958, nous sortions tout juste d’un monde millénaire où l’on vivait et mourait à l’endroit où l’on était né. Maintenant plus d’un adulte français sur deux vit dans un département différent de celui où il est né. La France n’est plus la même et ne le sera jamais plus ! Son présent et son futur ne seront plus jamais un passé toujours recommencé.